Le 1 er mai : Fête internationale des travailleurs

C'est en juillet 1889, lors du Congrès de fondation de la Deuxième internationale à Paris, que le 1 er mai est déclaré Fête internationale de tous les travailleurs et travailleuses. De 1891 à 1914, le 1 er mai est aussi fêté au Québec : des journaux d'époque parlent de la « parade annuelle des communistes » qui se déroule à Montréal. En 1927, comme la ville interdit toute manifestation dans les rues, les célébrations du 1 er mai sont ralenties. Jusque dans les années 1950, la journée est soulignée sans trop de cérémonie, car la parade a surtout lieu en septembre, à la fête du Travail.

Au début des années 1970, le 1 er mai reprend vie dans la mouvance des bouleversements politiques propres à la Révolution tranquille. Au Québec, la conjoncture est propice à la mobilisation et les centrales syndicales relancent les manifestations du 1 er mai. La fête prend alors des allures de manifestation nationale.

Avec la décennie 1980, la fête se régionalise et devient une fête populaire. Au lieu d'organiser une seule grande manifestation centralisée à Montréal et rejoindre ainsi des milliers de travailleurs, le programme de la fête mise sur des activités organisées sur les lieux de travail par les syndicats locaux.

La chanson militante

La musique reste aujourd’hui encore un formidable vecteur d’idées et un moyen privilégié d’exprimer un engagement. La chanson crée, transporte et transforme les humeurs. Ces caractéristiques en font donc un outil de luttes sociales qu’endosse la chanson militante, un genre certes marginal, mais dont les textes sont au service d’une cause. Ainsi, des airs connus servent-ils aujourd’hui pour donner un impact à des couplets de circonstance, faciles à reprendre par la foule. Entonnée à l’unisson, la chanson militante fait vibrer l’audience, créant un sentiment d’unité, de complicité, de force et de puissance.

À partir des années 1960, la guerre du Vietnam aux États-Unis et mai 68 en Europe favorisent l’émergence d’une scène engagée qui donne le ton à toute une génération. Bob Dylan, avec la chanson Blowin’ in the Wind , première chanson de révolte moderne à être diffusée à une échelle planétaire, est sans doute le point de départ d’une médiatisation des protest songs . Tirée d’un chant d’esclaves ( negro spiritual ), cette chanson est reprise par les 250 000 manifestants de la marche sur Washington de Martin Luther King en 1963.

Au Québec aussi des chansons se portent au secours des militants ou utilisent la manifestation comme sujet. Ces chansons sont composées entre autres pour soutenir des grévistes. La chanson Faut pas lâcher , composée par Émilien Laplante en 1975, est composée pour soutenir les grévistes de Thetford Mines qui défendent la santé et les salaires des travailleurs de l’amiante.

Depuis plus de trois mois
Que les gars sont en grève
Et puis à en juger
Ils ne sont pas tannés
D’la viande avariée
On en a tous mangé
Mais l’amiante est un danger
Qu’on n’peut plus digérer

Les gars, faut pas lâcher
Et il ne faut pas reculer
Car nous n’sommes pas
Des poules mouillées
Et tous ensemble, on doit lutter

D’années en années, quelques groupes composent des chansons engagées, dont les Cowboys Fringants, qui chantent les mobilisations populaires dans La Manifestation. Cette chanson incite le peuple à continuer le combat tout en exprimant une désillusion face à la capacité des citoyens de changer les choses.

La chanson militante

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Entrevue avec Philippe Bournival, professeur au conservatoire de musique de Trois-Rivières et étudiant au doctorat en interprétation à l’Université de Montréal, au sujet de la chanson militante.

Entrevue avec Philippe Bournival

La chanson militante, ça date pas d'hier. Politesse oblige, commençons par madame Bolduc. En 1920, elle chantait pour les travailleurs, pour leur redonner du courage à cause de la crise économique. « Ça va venir, ça va venir découragez-vous pas. Moi j'ai toujours le cœur gai et j'continue de turluter. » Aujourd'hui, aussi on chante pour les travailleurs. Richard Desjardins avec sa plume épée nous dit : « Les grandes cheminées éternelles comme l'enfer. Quand le gaz m'a pogné chu venu tout à l'envers. Entendez-vous la rumeur, la loi de la compagnie? Il faudra que tu meures si tu veux vivre mon ami. »
Si Desjardins a une plume épée, Boris Vian a une plume je dirais incendiaire peut-être même atomique. Avec cynisme, il invite des personnages politiques de son époque à une petite rencontre informelle. Voici ce qu'il se passa donc quand ils furent réunis « et, quand la bombe a explosé, de tous ces personnages, il n'en est rien resté ». Boum! La java des bombes atomiques.
Heureusement, la chanson militante peut se faire plus douce, poétique, délicate. Yves Duteil dans un beau texte et une belle mélodie, nous invite à prendre conscience de la beauté de la langue française. Un beau texte, bien senti, une belle mélodie, il nous dit : « C'est une langue belle avec des mots superbes qui porte son histoire à travers ses accents. Où l'on sent la musique et le parfum des herbes, le fromage de chèvre et le pain de froment. »
Rock et Belles Oreilles, même sujet, par contre une façon de le dire un peu plus humoristique, sarcastique, ridiculise ni plus ni moins les auteurs-compositeurs qui choisissent l'équipe de Shakespeare plutôt que l'équipe de Molière. « Because Icitte is a small marché. Icitte, there is no débouché. I want to pogne. »
Parlant de nos amis les Anglais, savez-vous qu'on peut militer en pyjama? Eh oui, en 1969 John Lennon et Yoko Ono dans un fameux bed-in chantaient pour la paix. « All we are saying is give peace a chance. »
Passons de cette chanson alitée à un sujet d'actualité : l'écologie. Mon ami, poète de Trois-Rivières Jean Laprise, nous dit: « Un jour il n'y en aura plus si à mon tour je continue de salir les grandes eaux à commencer par le ruisseau. » Que ce soit de façon humoristique ou poétique, en pyjama ou en cravate, si vous avez un message à faire passer, oubliez les arbres, chantez plutôt, car comme dirait Brassens : « Mourir pour des idées, d'accord, mais de mort lente. D'accord, mais de mort lente. »

Philippe Bournival
Professeur au conservatoire de musique de Trois-Rivières et étudiant au doctorat en interprétation à l’Université de Montréal

Équipe technique :
David Leblanc : Réalisateur/Cadreur/Monteur
Jonathan Leblanc : Technicien

Remerciement
Conservatoire de musique de Trois-Rivières

L’Internationale, pour les droits des travailleurs

Composée en 1871 par Eugène Pottier (musique de Pierre Degeyter en 1888), L’internationale, symbole des luttes sociales, devient la chanson officielle du mouvement ouvrier en 1889. Traduit dans pratiquement toutes les langues et compagnon des grands mouvements révolutionnaires depuis le début du 20 e siècle, ce chant met de l’avant le sentiment d’injustice ressenti à la fin du 19 e siècle par une classe ouvrière miséreuse. Il appelle la révolution communiste, conformément aux idées développées par le philosophe Karl Marx au milieu du 19 e siècle.

Après la Révolution d’octobre de 1917 en Russie, L’internationale devient l’hymne révolutionnaire du mouvement communiste et ouvrier à travers le monde. Pour le Parti communiste du Canada, fondé en 1921, et pour le Parti communiste du Québec fondé en 1965, cette chanson est importante : elle est chantée à la fin des congrès et joue un rôle rassembleur en unissant les mouvements ouvriers entre eux dans le monde entier. L’internationale est aussi une chanson d’espoir. Dans le temps de la Grande Dépression, beaucoup la chantent, sans pour autant être communistes, parce qu’elle apporte de l’espoir et combat l’oppression.

Debout ! les damnés de la terre
Debout ! les forçats de la faim
La raison tonne en son cratère
C’est l’éruption de la fin
Du passé, faisons table rase
Foule esclave debout ! Debout !
Le monde va changer de base
Nous ne sommes rien, soyons tout !

C’est la lutte finale
Groupons-nous et demain
L’Internationale
Sera le genre humain (bis)

L’internationale

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Voix masculine (Paul Jauresse) interprétant L’internationale accompagnée d’un orchestre.

Paroles : Eugène Pottier
Musique : Pierre Degeyter
Interprète : Paul Jauresse
1905. Source : www.archive.org

Debout ! les damnés de la terre !
Debout ! les forçats de la faim !
La raison tonne en son cratère,
C’est l’éruption de la fin.
Du passé faisons table rase,
Foule esclave, debout ! debout !
Le monde va changer de base :
Nous ne sommes rien, soyons tout !

C’est la lutte finale
Groupons-nous, et demain,
L’Internationale,
Sera le genre humain.

Ouvriers, Paysans, nous sommes
Le grand parti des travailleurs ;
La terre n’appartient qu’aux hommes,
L'oisif ira loger ailleurs.
Combien de nos chairs se repaissent !
Mais si les corbeaux, les vautours,
Un de ces matins disparaissent,
Le soleil brillera toujours !

C’est la lutte finale
Groupons-nous, et demain,
L’Internationale,
Sera le genre humain.

Solidarité, mes frères

S’il est une chanson qui a rythmé l’action syndicale, c’est bien Solidarité, mes frères. Composée en 1915 par un organisateur syndical américain, Ralph Chaplin, cette chanson est reprise dans de nombreux pays. Les paroles françaises sont composées par Jean Baumgerten. Aujourd’hui, c’est encore et toujours cet air qui unit les participants aux manifestations ou les grévistes.

Solidarité, mes frères et mes sœurs
Solidarité, mes frères et mes sœurs
Solidarité, mes frères et mes sœurs
Ensemble, nous vaincrons

Nous engraissons le capital et ses usines
Enchainés du matin au soir à la machine
Pour notre peine, des salaires de famine
Mais l’union nous rendra forts

  • Photographie en noir et blanc d'Eugène Pottier vers 1870.
  • Des travailleurs manifestent sur une place publique. Ils sont accoudés à une barrière.
  • Couverture dessinée de la partition de l'Internationale. Une femme brandit un drapeau et des fers brisés. Des gens l'acclament.

Conservatoire de musique et d'art dramatique